L’Université d’État d’Haïti à la lumière du « complexe de la chauve-souris »
Par
Mozart SAINT FLEUR, Sociologue
"Ce que la littérature zoologique ignore jusqu’ici de la chauve-souris, c’est justement sa capacité, une fois qu’elle se retrouve dans l’eau à nager de trois à quatre heures en restant suspendue sur l’eau, en cas de fatigue. Après la pause, elle recommence à nager. La chauve-souris, la nuit, aime surfer dans l’eau. Cependant, une fois dans l’eau elle nage jusqu’à la mort […][1]. (Délima, Pierre, Le Nouvelliste, 6 septembre 2016)."
Institution d’origine médiévale[2], l’Université
dans toute société qui se respecte, a toujours joué un rôle fondamental. En Haïti,
en revanche, cette institution fait l’objet d’une désorganisation[3]
totale, laquelle donne naissance à « un surpeuplement des petits centres universitaires
qui s’isolent les uns des autres sans pouvoir donner une réponse adéquate aux
multiples besoins de la société » (René Phèdre, 1997 : 4). Pendant
qu’ailleurs l’Université ne cesse d’être remaniée, l’Université[4] en
Haïti, qu’elle soit publique ou privée, demeure dans un état d’immobilisme, de
croupissement et d’engourdissement. Celle-ci est tellement désorganisée que n’importe
qui, aussi médiocre que soit son parcours intellectuel, peut être dit
propriétaire et se faire appeler Doyen et/ou Recteur. L’Université d’État d’Haïti[5]
(UEH), l’institution qui nous intéresse la plus dans ce travail, fait l’objet
de crises[6] permanentes.
Ces crises sont récurrentes au point où elles semblent devenir la mission fondamentale
de l’UEH. « Existant depuis 1944, l’Université d’État d’Haïti n’arrive pas
encore à se mettre à la hauteur de sa mission, de ses objectifs et de sa
vision déclarés » (Pierre Délima [2002]2014 :
83). La recherche n’y est nullement valorisée. C’est comme si les problèmes auxquels
fait face le pays pouvaient être miraculeusement résolus. À l’UEH, le désordre est
systématisé en ordre, pour parler comme Délima (2016). Personne ne joue son
rôle comme cela aurait dû l’être. L’UEH, en tant qu’institution, fonctionne à
la manière d’un navire sans capitaine. Sa logique de fonctionnement peut être
ainsi résumée: « Ôte-toi que je m’y
mette ». De là, l’on se demande : En quoi l’UEH est-elle
l’exemple typique du « complexe de la chauve-souris » dont parle
Pierre Délima (2016) ? Que peut-on attendre de l’UEH dans une telle
logique de fonctionnement? En quoi peut-on expliquer les problèmes[7]
auxquels fait face l’Université d’État d’Haïti? Quel est l’objectif poursuivi
par cette institution? Dans quelle mesure l’UEH qui, de son côté, ne peut même
pas s’autogouverner peut-elle arriver à aider la société haïtienne à faire face
aux différents problèmes qu’elle confronte? Sans prétendre l’exhaustivité,
c’est à ces questions et à bien d’autres que nous allons tenter de répondre
tout au long de cet article.
Avant d’aller plus loin, disons que cet article n’est pas
exhaustif. Il n’est pas non plus une satire. Il s’inscrit plutôt dans le cadre
du prolongement de la nouvelle grille de lecture utilisée par Pierre Délima, dans
son texte intitulé La société haïtienne
et le complexe de la chauve-souris, paru en 2016. Pour nous, l’amélioration
et/ou la rénovation de l’Université haïtienne, notamment de l’UEH est une
nécessité essentielle en vue de « former des techniciens conscients de leurs
capacités et de leurs limites, capables d'adapter intelligemment leurs
connaissances à la réalité dans laquelle ils devront agir » (Oswaldo
Sunkel, 1966 : 414). Ainsi
reconnaissons-nous combien il est risqué, voire périlleux, pour un étudiant qui
n’a pas encore soutenu son mémoire de sortie à l’UEH, d’oser fournir une
réflexion, aussi scientifique soit-elle, sur ladite institution, une institution
où le politique, l’agression physique et verbale, les menaces de mort, etc., priment
sur la réflexion et le dialogue. Soulignons que dans cette logique, le
développement de « la pensée complexe[8] »
à l’UEH est un impératif impérieux. Car le rayonnement d’une telle pensée nous
aidera, non seulement à affronter l’erreur, l’illusion l’incertitude et le
risque, mais aussi et surtout à cultiver le sens de la tolérance, le respect
mutuel, à accepter l’autre selon son point de vue[9]. Comme
l’aurait dit Max Weber, il n’y a pas qu’une seule façon de voir la réalité, car
le réel est insaisissable et, donc, complexe[10].
Selon Olivier Reboul [1989] (2014 : 43-44), l’Université
est une institution qui « allie l’enseignement supérieur[11] à
la recherche fondamentale». C’est aussi, selon lui, « la mémoire critique
et intellectuelle d’une société » (Reboul [1989]2014 : 43-44). De son
côté, Guy Rocher (1990), lui, écarté de la conception humaniste de
l’Université, voit dans cette institution, non seulement un lieu d’enseignement
et de recherche, mais aussi un lieu politique. Il nous dit en ses termes :
"On préfère la [l’université] définir comme une institution de haut savoir,
exclusivement dédiée à l'enseignement et à la recherche. C’est s'aveugler, car
même lorsqu'elle se cache à elle-même sa fonction politique, l'université
l'exerce sans vouloir en prendre conscience. […]. Ce n'est certes pas en niant
la fonction politique de l'université qu'on s'en libère. (Rocher,
1990 :18)."
Se basant sur l’UEH, Gérard Pierre-Charles (1988 : 6) a
signalé qu’elle est une institution portant «les stigmates de 30 années de
dictature ». Avec le décret du 19 décembre 1960, pris par Duvalier, ajoute
l’auteur, cette institution «a souffert d’un processus de macoutisation ».
Cette «macoutisation», avance Pierre-Charles, a duré plus d’un quart de siècle
et « l’a dégradé du point de vue académique et moral, la condamnant à
l’abandon, à la médiocrité » (Pierre-Charles, 1988:6).
Pierre Délima (2016), pour sa part, a signalé, sans
aucune tergiversation, que « l’Université, qui constituerait la superstructure
idéologique de la société [haïtienne] tourne en rond tout au long de l’histoire
sans pouvoir se développer, répondre à sa mission et se mettre en conformité
avec les besoins de celle-là » (Délima, 2016 : 52).
Mathieu Rémy (1998), lui, s’accentuant sur les problèmes
auxquels confronte l’UEH, a signalé:
"Par sa carence de structures propres à faciliter la communication directe
avec les autres composantes du système éducatif, l’Université d’Etat d’Haïti
accuse tous les signes d’une institution juxtaposée, mal intégrée à son milieu,
incapable de définir ses objectifs généraux de formation […] (Mathieu, Rémy, 1998 : 102-103)."
James Engé (2013), de son côté, se montrant beaucoup plus
radical que les autres auteurs haïtiens sus-mentionnés, ne mâche pas ses mots. Il
met à nu « le voile qui cache le dysfonctionnement de l’UEH ». Ce
voile, selon lui, « a pour cause principale que les personnes ressources
ne sont pas à leurs justes places » (Engé, 2013 : 152). À son avis,
tout est politisé à l’UEH. Sur ce point, il a déclaré qu’on politise le budget,
la nomination des professeurs à temps plein, le cursus académique, la
préparation et la soutenance des mémoires, la recherche, en somme la mission
scientifique de l’Université (Engé, 2013 : 152).
Arrêtons ici un peu pour élucider le rapport de l’UEH au
« complexe de la chauve-souris (CCS[12]) ».
Soulignons que l’expression ’’complexe de la chauve-souris’’ est de Pierre
Délima (2016). Il s’agit d’une nouvelle grille de lecture se situant entre la
sociologie et la psychanalyse, laquelle est utilisée par l’auteur pour parler
du « blocage » ou de
l’impasse dans lequel se trouve la société haïtienne. «De manière imagée et
imaginée, le CCS consiste à nager pour ne pas s’en sortir » (Délima,
2006 : 48). Autrement dit, le « complexe de la chauve-souris est
ainsi défini : « Se créer de nouvelles difficultés pour garder la tête sous l’eau chaque fois qu’une porte
de sortie s’ouvre[13] ».
À notre humble avis, l’Université d’État d’Haïti[14] (UEH),
en tant que sous-système du système global qu’est la société haïtienne, elle
aussi, n’est pas exempte du « Complexe
de la Chauve-souris » dans la mesure où elle fait face à une
multiplicité de crises depuis sa fondation, lesquelles l’empêchent de répondre
efficacement à ses missions[15].
Aussi, après son processus de « macoutisation », rien n’a été fait en
termes de changement (s) pratique (s). Elle n’a pas non plus su profiter de la
période de l’entre-deux-guerres ni celle de 1945 à 1990 – considérée comme la
plus féconde dans l’historiographie mondiale de l’enseignement supérieur
(1993 : 3). L’UEH
est donc le bastion de crises permanentes.
On dit souvent que « Vouloir sortir d’un trou, c’est cesser de le creuser »
Délima (2016 : 44). À l’UEH, c’est tout le contraire. Les trous sont si profonde
qu’il devient difficile, voire impossible de s’en sortir. Aussi, le désordre,
l’autoritarisme, l’absence de respect mutuel, l’ « incendiarisme[16] »,
sont entre autres des éléments qui sautent le plus aux yeux. Le mot d’ordre,
comme il est sus-mentionné: « Ôte-toi
que je m’y mette ». Aucun effort, sinon de manière théorique, n’a été
fait afin que l’UEH puisse répondre effectivement aux problèmes auxquels fait
face le pays – un pays sauvagement dévasté par le tremblement de terre du 12
janvier 2010. L’UEH[17]
aurait dû saisir cet événement afin de repenser son programme, donc, son mode
de fonctionnement, etc. Pourtant, elle continue à marcher de fatalité en
fatalité. Voilà, très brièvement, ce qui nous amène à ouvrir le cadre d’analyse
de Délima (2016) en établissant le rapport entre l’UEH et la chauve-souris en
situation de nage dont parle l’auteur.
Selon l’auteur:
"La chauve-souris en tant qu’animal, est fixé par des dispositions
naturelles qui lui donnent la possibilité, toutes les fois qu’elle se trouve
dans un milieu aquatique, qui n’est d’ailleurs pas son milieu naturel, de
nager, de se débrouiller et de se débattre dans l’eau jusqu’au bout de souffle.
Elle laisserait l’impression de tirer un fou plaisir de la nage. Par contre, il
n’en n’est point question car, elle est condamnée à nager jusqu’à la mort, donc
sans pouvoir ni devoir s’en sortir (Délima, 2016 : 42)."
La permanence des crises à l’UEH confirme bien cette
observation. Fondée en 1944, celle-ci reste jusqu’à aujourd’hui à l’État
embryonnaire et ne fait preuve d’aucune attirance pour les étrangers. Sa
dynamique de fonctionnement laisse entrevoir qu’il s’agit d’une Université qui
a été conçue exclusivement pour les haïtiens.
Soulignons, toutefois que Délima (2016) n’est pas
pessimiste quant à l’avenir de la société haïtienne. Après avoir mis à nu les
problèmes qui trainent en longueur au sein de ladite société, l’auteur nous
invite à faire un dépassement. Ainsi, a-t-il fait remarquer que « L’essai, La société haïtienne et le complexe de la chauve-souris, ne
constitue pas un traité du « désespoir », mais ramasse certaines
traces des faits qui alimentent le désespoir et sollicite une rupture »
(Délima, 2016 :309). À son avis, « La catharsis[18]
est possible, mais elle doit déboucher sur la définition et l’adoption de la
priorité : la stabilité pour le développement du pays par un changement de
mentalité individuelle au profit du collectif » (Délima, 2016 : 309).
Comment peut-on savoir qu’on est à destination si l’on n’avait
pas d’abord fixé là où l’on voulait arriver? En d’autres mots, comment peut-on
espérer trouver la chose si l’on ne sait même pas ce qu’on cherche? Et, c’est
exactement la position de Rémy Mathieu en ce qui concerne l’objectif de l’UEH.
Celui-ci nous dit que « […] l’UEH, ne sachant pas ce qu’elle cherche ou
poursuit, ne pourra rien trouver» (Mathieu, 1998 : 87-88). L’analyste
poursuit en disant que « […] c’est là une situation dangereuse en matière
d’éducation. Tant qu’à ne point savoir où elle va, il y a fort à parier que
l’UEH a déjà contribué à fabriquer la plupart des monstres, anarchistes et
apatrides qui peuplent la société
haïtienne » (Mathieu, 1998 : 87-88).
Ce n’est pas, ce nous semble, « L’idée d’Université[19] »
qui nous échappe dans ce pays. D’ailleurs, la grande majorité des professeurs,
doyens, recteurs, etc., durant leur parcours intellectuel, voyagent, voient et fréquentent
des universités prestigieuses de l’étranger et lisent de grands ouvrages. Le
problème semble plutôt résider dans un esprit clanique, désordonné qui ne cesse
de grandir au jour le jour à l’UEH et ne pouvant nous empêcher ni de tourner
autour du pot ni de surfer sur l’eau comme des chauves-souris en situation de
nage, pour parler comme Délima.
Dans cet article, nous sommes convaincu que l’Université
est bien plus qu’un espace d’hostilité brutale, d’autoritarisme, de carnage, de
meute, comme beaucoup d’entre nous l’ont toujours supposé. L’Université est bien
plus qu’un espace où règne la logique du plus fort, selon la logique
hobbesienne. Elle n’est pas non plus un lieu où l’agressivité prime sur le
dialogue et sur la réflexion. L’Université est loin d’être une arène où
s’affrontent les clans avec pour principe « ôte-toi que je m’y mette ».
Nous défendons l’hypothèse que l’Université recèle un
lieu de réflexion, de production, d’échange, de respect mutuel ; un lieu
où l’académique est en avance de phase sur le politique et sur l’intérêt
individuel. Autrement dit, l’Université « est, ou elle devrait
être, l'intelligence de la nation, le centre de l'activité intellectuelle d'où
surgit la rénovation de la vie scientifique, sociale, culturelle et politique
d'un pays (Sunkel, 1966 : 409). Elle
est, ou elle devrait être, « le centre de la pensée où se concentre
l'effort d'interprétation de la société dont elle fait partie, en étudiant le
sens de son histoire et en contribuant à révéler son image future »
(Sunkel, 1966 : 409). L’Université,
comme l’a si bien dit Reboul ([1989]2014) est « le seul lieu où la
critique est institutionnalisée, officielle en quelque sorte ; un lieu qui
doit ou devrait être avant tout un lieu de « loisir » et
d’indépendance » (Sunkel, 1966 : 47).
En bref, pour
répéter Rémy Mathieu (1998 : 133) :
"L’institution universitaire, admise comme lieu de création et de diffusion
de transformation et de conservation du savoir, du savoir-faire et du
savoir-être, n’est rien moins que le lieu d’exécution d’un avenant à ce contrat
social qui nous vaut d’être organisée en société."
Donc, l’Université est loin d’être un labyrinthe, un
chaos, une jungle. La jungle, comme dit le dicton populaire, est un enfer; mais
à l’UEH, nombreux sont ceux qui ont fini par l’admirer.
On entend souvent dire que la capacité d’accueil de l’UEH
est absolument faible. Nous disons que c’est faux et archi-faux, car comment
voulez-vous qu’une institution dont sa capacité d’accueil est absolument faible
accepte et tolère qu’un étudiant y passe au moins huit ans, pour une durée
d’étude de quatre ou cinq ans, sans que cela n’interpelle les autorités
concernées? Passer un temps plus long que le cycle d’étude à l’UEH devient
monnaie courante. Parfois, c’est voulu. Parfois, c’est non voulu. Tout se passe
comme si c’était normal. La gestion du temps nous échappe grandement. D’où une
UEH qui tourne en rond.
S’accentuant sur les crises auxquelles fait face l’UEH, Remy
Mathieu (1998 : 112) nous dit :
"À côté de tant d’autres non évoquées ici, la crise de l’UEH provient de
toutes ces malaises suscitées par une très longue période de gestion
insouciante du temps, de l’espace des moyens matériels, institutionnels et de
la qualité des ressources humaines indispensables à la consolidation et à la
prospérité durable et irréversible de notre être collectif."
Si le temps, comme le dit Norbert Élias[20] ([1984]
1989), sert à mesurer quelque chose, alors, compte tenu de la « gestion insouciante du temps »
à l’UEH, n’est-ce pas très douteux de dire que ce quelque chose-là existe à
ladite institution? Telle n’est pas ici notre préoccupation.
Passons maintenant à l’une des missions fondamentales accordée
à l’UEH, à savoir la recherche[21].
Considérée au sens général du terme, la recherche est « la production de
savoirs nouveaux, dont le contenu est publiquement contrôlable» (Reboul [1989]
2014 : 45). Pour certains, à l’UEH, la recherche est quasiment
inexistante (René Phèdre, 1997 ; Fréderic Gérald Chéry, 2012 ; Hérold
Toussaint, 2016 ; Fritz Dorvilier, 2013). Selon ces auteurs-là, cette
institution se voue presqu’exclusivement à la formation, donc à l’enseignement[22]
et non pas simultanément à la formation et à la recherche, comme le font par exemple
beaucoup d’autres universités à travers le monde.
Phèdre (1997 : 112) signale que faute d’un « programme
d’études avancées, on finit par restreindre les activités de recherche à la
seule expérience de recherche conduisant à la réalisation d’un mémoire ».
Ainsi, si la recherche scientifique à l’UEH n’est pas
totalement absente, elle semble n’être pas toujours encouragée. Les
quelques-unes qui ont été réalisées sont restées à la critique rongeuse des
souris. Ils ont presqu’aucune valeur en termes d’utilité pratique. Cette indifférence vis-à-vis des idées
produites localement est presque semblable aux constats de Louis-Joseph Janvier
en 1884 sur les œuvres littéraires produites en son temps. Dans son article
titré « L’évolution littéraire en
Haïti : Les poètes et les auteurs dramatiques », Janvier (1884 : 1) a signalé qu’ « Il faut
avouer que jusqu’à ces derniers temps, et même dans la classe aisée de la
société haïtienne, l’indifférence pour les œuvres nées des cerveaux haïtiens a
été malheureusement générale ».
Fritz Deshommes (2011 : 12), de son côté, a signalé
qu’à l’UEH, la recherche est vécue comme une «activité secondaire », et, donc
«traitée en parent pauvre ». Aussi, à son avis, du point de vue global,
plutôt que la recherche, la publication, l’acquisition des matériaux nécessaires
à la recherche, quelle que soit la faculté considérée, « la priorité est
accordée à la rubrique des salaires » (2011 : 30). En bref, selon
Deshommes, « la recherche à l’UEH est à ses premiers balbutiements »
(Deshommes, 2011 : 12).
Comment peut-on développer un pays sans mettre l’emphase
sur la production scientifique?
Avançons pour dire que, par le développement des sciences
modernes, l’Université ne cesse de prendre
de nouvelles tournures. Alors que l’enseignement et la recherche sont maintenant
considérés comme missions traditionnelles de l’Université contemporaine, en
Haïti, ces deux missions dites traditionnelles de l’Université sont loin d’être
efficacement remplies. Ces changements sont signalés par Tim Vorley et Jen
Nelles, dans leur article intitulé « (Re)
conceptualiser l’université : Le développement institutionnel[23] »,
publié en 2008. Ils disent:
"Qu’ils soient unis ou distincts, l’enseignement et la recherche sont, en
tant que missions traditionnelles de l’université contemporaine, de plus en
plus soumis à une dynamique nouvelle. À l’heure actuelle, l’essor de l’économie
de la connaissance observé partout dans le monde fait des universités le moteur
même de la croissance économique […] – nouveau glissement qu’Etzkowitz et al. (2000) qualifient de « seconde
révolution académique ». En substance, cette révolution désigne la
transformation des universités, autrefois véritables tours d’ivoire, en
institutions plus engagées au plan socio-économique (Tim Vorley &Jen Nelles, 2008 : 148)."
Est-ce réellement, comme on dit toujours, les moyens qui
manquent à l’État [haïtien] quant à la mise en place d’une Université sérieuse?
Au dire de Chéry (2012), ce n’est pas l’argent qui
fait défaut à l’État [haïtien], mais plutôt un cliché ayant pour base la
faiblesse de l’Université dans la question de l’aide de l’État. D’où le maigre
budget attribué à la recherche. Dans cette logique, doit-on espérer quelque
chose de l’UEH, voire la classer au rang des Universités?
Pour Rémy Mathieu, « […] le propre de
toute Université efficace est de savoir anticiper sur les problèmes de
l’avenir » (1998 : 134). Dans ce même ordre d’idée, Mumpasi LUTUTALA a déclaré :
"Le regard et l’intérêt portés sur l’université se
focalisent généralement sur son rendement interne (le nombre d’étudiants formés
à tous les niveaux du système, la qualité de la formation, la durée des études,
la recherche ou la production des connaissances et leur qualité,
l’internationalisation, les publications scientifiques) et externe
(l’employabilité des diplômés et leurs performances professionnelles, et le
rôle de l’université dans la gouvernance et l’édification de la société). C’est
par ces indicateurs que l’on mesure les performances d’une université, et qu’on
la situe dans le classement des universités. (LUTUTALA,
2012 : 23-24)."
Sans aucune prétention de prendre pour recette les
indicateurs cités par Mathieu (1998) et Lututala (2012), l’UEH répond-elle à
ces critères ? Sinon, à combien d’entre eux répond-elle? D’où l’impérieuse nécessité de réorganiser
l’Université en Haïti, qu’elle soit publique ou privée. Parmi les problèmes auxquels
il faut s’attaquer dans la poursuite de cette réorganisation, citons entre
autres « Les programmes, la pertinence et l’aménagement des cours dans les
sessions, le nombre de crédits correspondant à chaque cours, le nombre de cours
à chaque programme, la gestion des cours, la répétition des cours d’une entité
à une autre» (Délima, [2012] 2014 :96). À cela s’ajoute « la mobilité
des étudiants à l’intérieur de l’UEH, le temps réglementaire des études, la
gestion des ressources disponibles la qualification des professeurs d’Université,
l’échange interuniversitaire, les bibliothèques » (Délima, [2012] 2014 :96).
De là, laisse entrevoir que l’idée de « réforme
universitaire » n’est pas du tout mauvaise en soi. Seuls les gens ayant
l’esprit inculte pourraient ne pas voir dans cette dite réforme un impératif
impérieux. Malheureusement, politisée et désordonnée, elle [cette réforme[24]-là]
ne fait qu’attirer la haine du côté de bon nombres d’étudiants, de professeurs,
etc. D’où, malgré son importance capitale, son goulot d’étranglement. Mis à
part les éléments pré-cités, on pourrait considérer l’imperméabilité de
certains dirigeants du pays, en général, et de l’UEH, en particulier, à l’idée
de réforme. Beaucoup plus sonores que pratiques, certains dirigeants semblent être réfractaires à l’idée d’une
Université réformée. La logique est qu’à bord du pouvoir, ils voient
tout ; mais qu’une fois au pouvoir, ils ne voient rien, et, donc sont
aveugles. Aussi, à force d’être accoutumé à une chose [qu’elle soit bonne ou
mauvaise], il est possible qu’on finisse par « tirer un fou plaisir de la
nage ». D’où la situation de coma de certaines entités de l’UEH. D’où aussi,
selon nous, le rapport existant entre le mode de fonctionnement de cette
institution et les « chauves-souris » dont parle Délima (2016).
Dans ce cas, qui sont les principales victimes? Le
recteur ? les doyens ? les professeurs ? les petits personnels, etc. ?
En tout cas, seuls les gens ayant l’intelligence lourde comme les ailes de la
chauve-souris dans l’eau, pour parler comme Délima, pourraient ne pas voir que
ce sont les étudiants qui sont les principales victimes. Car, et les
professeurs et les doyens, etc., ils continuent à recevoir leur salaire[25].
Il en découle de toute l’analyse précédente que l’UEH, à
l’instar de presque toutes les autres institutions du pays, ne cesse de tourner
en rond à la manière de la chauve-souris dans l’eau. Elle est, en toute
logique, une Université « en retard de vision et de structure », une
université « conservatrice et extravertie », marquée par
« l’absence de politique prévisionnelle », « l’absence du sens
d’anticipation sur les problèmes de l’avenir» (Rémy Mathieu, 1998). Dans
cette logique crasseuse de fonctionnement, l’UEH est l’exemple typique, non
seulement du « complexe de la chauve-souris », mais aussi du «paradoxe
de l’âne de Buridan[26] ».
On ne saurait clore l’article sans apporter une précision
fondamentale. Contrairement à ce que pourraient imaginer certains « esprits
obscurs » ou « approximatifs[27] »,
réputés en matière de déformation des idées scientifiques produites en toute indépendance
intellectuelle, cet article n’a ni pour but de détracter l’UEH ni pour froisser
quiconque. Il vise plutôt un prolongement du cadre théorique de Pierre Delima
(2016). Aussi, en ce qui concerne l’UEH, l’article ambitionne un autre rapport entre
les dirigeants et les dirigés (Chéry, 2012) afin de sortir du trou dans lequel
nous nous trouvons. D’où la nécessité de « cesser d’agiter le spectre du
chaos » (Délima, 2016 : 283). D’où, aussi, la nécessité de mettre de côté
la rancœur et l’hypocrisie : deux obstacles majeur en matière de d’entente.
Le temps est venu pour que l’Université haïtienne – qu’elle soit publique ou
privée – devienne une boussole pour la société. Quel organisme de la société
sera plus qualifié que l’Université dans l’accomplissement de cette tâche? Autrement
dit, « Où donc, si ce n’est au sein même de l’organe de la société qui a
pour mission d’inculquer le respect de la vérité […] et de faire preuve d’une
énergie morale et suffisante pour exprimer la vérité en quelque circonstance
que ce soit ? » (OSWALDO, Sunkel, 1966 : 413). Pour ce faire, la
société haïtienne et les universités du pays devraient cesser de
fonctionner à la manière de deux pôles
identiques de deux aimants. Elles doivent cesser également de fonctionner comme
des chauves-souris dans l’eau. Car, « Nager par nécessité pour ne pas
mourir dans l’eau et mourir en nageant pour ne pouvoir s’en sortir est un
dilemme » (Délima, 2016 : 44). Que l’Université haïtienne devienne
une université « ouverte » « agissante[28] »,
« vivante» et « innovante », etc.!
Septembre 2017
©All Rights Reserved
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[1]
DELIMA, Pierre. 2016. Qu’est-ce que le complexe de la chauve-souris». Le Nouvelliste 6 septembre. URL :
,
consulté le 25 août 2017.
[2] Cette
conception n’est pas partagée par tout le monde. Pour André Ségal (1997 : 7),
« L'université est précisément une structure longue des sociétés
occidentales, bien qu'il faille se demander si elle est réellement d'origine
médiévale ou si elle n'aurait que deux siècles ».
[3] Pour
parler de la désorganisation de l’enseignement supérieur en Haïti, Pierre
Délima (Délima [2012] 2014) utilise l’expression de «balkanisation ». Selon
lui, « Le constat le plus simple permet d’établir que l’enseignement
supérieur en Haïti est dans une situation de « balkanisation » (Délima
[2012] (014 : 74)
[4] « Il existe trois types
d’Université en Haïti : l’Université d’État d’Haïti, les Universités
privés de types laïque et confessionnel les Universités publiques » (Délima,
[2012] 2014 : 83).
[5]
L’Université d’Haïti, fondée en 1944, est devenue l’Université d’État d’Haïti
par le décret du 16 septembre 1960.
[6] Selon
Rémy Mathieu (1998), la notion de crise « admet plusieurs acceptations »
(MATHIEU, Rémy, 1998 :24). Il signale que « dans le cas d’une
institution telle que l’Université, fondée sur l’interrelation humaine à
finalité sociale, la crise peut se définir comme le moment critique
d’exaspération des contradictions internes ; cette phase explosive à
laquelle aboutissent des conflits d’intérêts matériels ou moraux persistants en
non résolus à la satisfaction des partis en litige. » (MATHIEU, Rémy,
1998 :24). Olivier Reboul, pour sa part, nous dit que « si l’université
est en crise, il s’agit essentiellement d’une crise d’identité » (Reboul [1989]
2014 : 43).
[7] Ces problèmes
sont à la fois « d’ordre structurel, infrastructurel, organisationnel,
administratif et pédagogiques » (Délima, [2012]2014 : 93).
[8] Le
concept « Pensée complexe » est d’Edgar Morin.
[10]
Aussi, le développement de la pensé de G. Simmel, Max Weber, W. Pareto, nous
serait beaucoup utile.
[11] Le
terme ‘‘enseignement supérieur’’, selon
l’auteur, n’a rien « d’anti-démocratique ». Un enseignement, dit-il,
est « supérieur » « au sens précis où il n’y en a plus au-delà
de lui [...] » (Reboul [1989] 2014 :44).
[12]
S’accentuant sur la sociogenèse du CCS, Pierre Délima (2016 :56) a signalé
qu’ « […] il faut comprendre que le CCS ne va pas de soi. Il n’est ni la
résultante d’une génération spontanée en 1804 ni une fatalité du temps. Il est
historiquement construit sur le plan mental à partir de la réification humaine,
des pratiques sociales et des intégrations. La semence de de l’édification
inhibée formant le CCS se situe donc au-delà de l’avènement d’Haïti à
l’indépendance. Le format du CCS provient de l’esclavage, dans ses pratiques et
le mode de cassure révolutionnaire, qui n’a pas été géré par l’adoption d’un
modèle nouveau de société […] ». Voir
DELIMA, Pierre. 2016. La société
haïtienne et le complexe de la chauve-souris : Québec, Délima Pierre
et les Éditions Mémoire.
[13] Voir PIERRE, Pégy F. C. 2016.
« Qu’est-ce que le complexe de la chauve-souris ? ». Le
Nouvelliste 6 septembre. URL : <http://lenouvelliste.com/article/162815/quest-ce-que-le-complexe-de-la-chauve-souris>,
consulté le 26 aout 2017.
[14]
Soulignons que « Tous les pans de la société haïtienne peuvent être vus au
travers du CCS » (Délima, 2016 :97).
[15] En ce
qui concerne la mission théorique de l’UEH, voir les articles I, II, III, IV,
et V de l’Avant-projet de loi portant sur l’organisation et le fonctionnement
de l’UEH, mars 2005.
[16] Le
concept « Incendiarisme » a été utilisé par le Professeur Fritz
Dorvilier alors qu’il était en train de dispenser son cours de Sociologie du
développement à la Faculté des Sciences Humaines, en 2016.
[17] Ceci
est valable pour toutes les autres Universités du pays.
[18] Par
la catharsis, considérée ici comme prise de conscience individuelle et
collective en vue du dépassement, de la transcendance et de l’élévation au-dessus
de tout ce qui divise pour attendre ce qui unit […] (Délima, 2016 :310)
[19] Voir, à cet effet, TOUSSAINT, Hérold. 2016. L’idée d’université expliquée aux étudiants.
Introduction de Laënnec Hurbon: Port-au-Prince, Imprimerie Média –Texte.
[20] Voir ELIAS, Norbert.
[1984] 1989. Sobre el tiempo.
Traducción de Guillermo Hirata, Madrid, Fondo de Cultura Económica, S. A. de C.
V.
[21] La
recherche universitaire, selon Reboul règle trois fonctions: d’abord, la recherche approfondie ou
fondamentale ; ensuite, une fonction de maintien ; enfin, une
fonction de mémoire critique ou de réflexion. Toutefois, selon l’auteur, la
dernière fonction, en l’occurrence de la fonction critique, peut exercer dans
d’autres endroits, mais il est certain que l’université est l’endroit unique où
« la critique est institutionnelle, officielle en quelque sorte» (Olivier
Reboul [1989] (2014 : 45-46).
[22] Pour
un auteur comme Olivier Reboul [1989] (2014 : 44), il y a trois types
d’enseignements. D’abord l’enseignement culturel ; ensuite,
l’enseignement professionnel ; enfin l’enseignement de la recherche. Tout
en restant distincts, voire en conflits, dit l’auteur, ces derniers sont
souvent confondus dans les faits.
[23] Dans cet article, ces deux auteurs ont signalé trois missions de
l’université au cours de son évolution. D’abord, jusqu’au milieu du XIXème
siècle, l’université avait pour mission « l’enseignement ». Ensuite,
« la recherche a donc rejoint l’enseignement, et constitue depuis lors la
deuxième mission de l’université». Enfin « En raison de la nature principalement
économique les universités sont désormais qualifiées d’« entrepreneuriales. »
Toutefois, selon ces deux auteurs, «loin d’être détachée des fonctions de base
de l’université, la Troisième mission est inextricablement liée à l’enseignement
et à la recherche » (Tim Vorley et Jen Nelles, 2008 : 147 -152)
[24] À
l’instar du concept « démocratie », le mot ‘’réforme’’, en Haïti, devient
banal et vide de sens à cause du mauvais usage qu’on fait d’eux.
[25] D’où
un exemple de détournement du proverbe : « L’ouvrier qui travaille
mérite son salaire ».
[26]
« Le paradoxe de l’âne de Buridan est la légende selon laquelle un âne est
mort de faim et de soif entre son picotin d’avoine et son sceau d’eau, faute de
choisir par quoi commencer ».Voir : https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Paradoxe_de_l%27âne_de_Buridan
[27] Ces expressions sont de François Ricard. Voir RICARD, Francois.1985.
« Sur deux fonctions occultées de l’université ». Liberté, vol. 27, n° 2, (158), p. 83-90.
URL : http://id.erudit.org/iderudit/31259ac.
[28] Pour une bonne compréhension des
concepts d’université « ouverte », « agissante » et « vivante ».Voir
OSWALDO. Sunkel.1966. « Université, développement économique et
planification ». In : Tiers-Monde, Tome 7, no 26. Blocages
et freinages de la croissance et du développement (1), pp.409-415. DOI :
10.3406/tiers.1966.2213.
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